Demeurons sur la vigne
- Thierry Larcher
- 22 mai
- 4 min de lecture
Guebwiller le dimanche 11 mai 2025, pasteur Thierry Larcher

Jésus se sert ce matin de l’image de la vigne pour nous encourager à demeurer en lui et pour que ses paroles demeurent en nous. Mais, qu'est-ce que cette image de la vigne, dans une paroisse où elle est bien connue, peut réellement nous apporter ? Trois éléments semblent émerger de cette comparaison.
La première, c'est que, si dans l'Ancien Testament, le peuple d'Israël est souvent comparé à une vigne qui doit porter beaucoup de fruits et que, dans le christianisme, l'Église est souvent aussi vue comme une vigne, ici, Jésus est clair. Il commence son affirmation par son "ego eimi" "moi, je suis". Jésus affirme fortement qu’il est la vraie vigne, comme en d'autres passages de l'évangile de Jean, il est le vrai berger ou la porte.
Jésus-Christ nous porte, nous donne la sève de la vie. Il fait en sorte que nous puissions porter du fruit et vivre. Que nous soyons un individu, un peuple ou même une Église, il nous faut alors savoir faire preuve de modestie. Nous ne serons jamais assez saints pour être la vigne, nous ne serons toujours que des sarments qui dépendent de la vigne et sans qui, nous risquerions de nous dessécher. La modestie n’est-elle pas une qualité dont l'humanité manque trop souvent ? Si vous avez déjà eu le plaisir de participer à des vendanges, vous savez à quel point sont maltraités les fruits des sarments. Une fois coupés, ils sont secoués et ballotés avant d’arriver chez le vigneron. Mais, arrivés là, on les foule au pied ou désormais avec des machines. Rien ne leur est épargné. Or, malgré ce traitement, le vigneron espère qu'ils donneront du bon vin et ne produiront pas que de l'aigreur. En résumé, comme dans bien d’autres paroles du Christ, c'est bien en cherchant à demeurer petits que nous pouvons espérer grandir un jour.
Avant de passer au deuxième élément, retenons encore que le lien de la vigne entre Jésus et nous est tellement vital, que le Christ répète plusieurs fois, son « demeurez en moi ». Cela montre une intimité indispensable, une grande proximité, mais aussi une grande tendresse. Après tout, Dieu étant décrit comme le vigneron, il risquerait, en cas d'échec répété de la vigne, de l'arracher. Le Fils de l'homme porte ainsi un lourd fardeau, celui de nous donner des paroles de vie et celui de nous voir porter des fruits, sans quoi ce serait lui que l'on pourrait accuser d’avoir échoué.
Mais, cela souligne autre chose encore, c'est lui-même qui nous nourrit par cette sève spirituelle qu'est sa parole, comme il le dira juste après notre passage, quand il précise que demeurer en lui, c’est écouter sa parole. Par sa parole, il nous donne nourriture, eau, nutriments indispensables. Si nous refusions cette sève, sa parole, la conséquence s'annonce évidente, nous nous dessécherions rapidement.
Jésus ne souhaite qu’une chose, nous donner sa vie, son essentiel, pour que nous puissions grandir et porter du fruit. Il est une vigne comme celle que nous avons pu voir avec les jeunes le mois dernier, en approchant des Cévennes. Elles sont là-bas toutes petites et chétives, très modestes à vrai dire. Il ne craint pas de demander à son Père-vigneron de se baisser et s’abimer le dos pour prendre soin des sarments. Il sait qu’en restant près du sol, il nous protège des vents forts et d’autres intempéries.
Le deuxième élément concerne le fait d’être émondé, le fait de couper des sarments morts pour que ceux qui sont vivants puissent grandir davantage et porter plus de fruits. Le risque serait ici de craindre ce geste du Père qui vient aider son Fils pour que la vigne porte du fruit. Risquons nous d'être coupés, séparés du Christ et des autres sarments ? Jésus veut de suite rassurer ses disciples en leur disant : « Vous, vous êtes déjà purs, à cause de la parole que je vous ai dite. » Celui qui demeure en Jésus ne peut donc être coupé de la vigne, seul celui qui rejette le Christ est déjà mort.
La parole de Dieu est donc bien nourriture et vie pour nous. Une parole qui, chez Jean tout particulièrement, s'est incarnée dans le Fils de Dieu. Ayons chaque jour une oreille et un cœur pour cette parole, et nous serons de beaux sarments. Cette parole sera elle-même l’outil pour nous émonder. Elle ôtera de nous ce qui est vieux ou ce qui est mort, pour ne vivre que dans le présent et l'espérance du royaume futur.
Vivre fidèlement en Christ, c'est par conséquent accepter que sa parole nous débarrasse de ce qui est mort, surtout qu’elle ne s’arrêtera pas là, elle coupera aussi les feuilles qui nous empêchent de recevoir la lumière de Dieu, et alors, nous aurons encore davantage de fruits. Vivre fidèlement dans le Christ, c'est accepter en toute occasion notre place, demeurer modeste.
Le dernier élément découle de ce que nous venons de dire. Il s'agit de la relation entre le Christ et chacun de nous. En tant que sarments, nous pouvons pousser n'importe où sur la vigne, nous recevrons toujours tout ce dont nous avons besoin. Dieu nous donne cette liberté chère aux protestants. Étant vigne et vigneron, Dieu se charge de nous protéger, de nous nourrir, de nous abriter en cas de fort soleil, ou de pluie interminable. Avec lui, nous sommes ainsi sur un chemin de liberté qui comporte heureusement des garde-fous, incarnés dans sa Parole. Mais, cette relation d'amour et de don ne va pas sans responsabilité. Il nous revient de demeurer sur la vigne, de ne pas croire que l'arbre d'à côté, petit ou grand, sera meilleur pour nous. La vigne est un arbre bien modeste comparé à d'autres, mais ce qu'elle nous donne, aucun autre ne peut nous le donner.
Aussi, et en conclusion, si Jésus ressemble plutôt aux vignes du sud quand il prend soin de nous et nous invite tendrement à demeurer en lui, à nous de faire en sorte que, chaque jour, il soit aussi une vigne comme celles que nous connaissons en Alsace, grande et solide, car il pourra être fier des sarments que nous sommes et avoir confiance en notre foi.
Amen.
Thierry Larcher
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