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Huit paroles de vie

  • Roland Kauffmann
  • 12 oct.
  • 5 min de lecture

Guebwiller 12 octobre 2025, culte KT, Béatitudes II



Nous continuons aujourd'hui notre exploration du bonheur entamée lors de notre premier culte avec les catéchumènes le mois dernier. Souvenez-vous, nous avions lu les béatitudes « Heureux les … ». Huit paroles de Jésus qui sont un véritable appel à l'engagement et à la responsabilité dans le monde.

 

Heureux les humbles, ceux qui savent ce qu'ils doivent aux autres ; heureux ceux qui éprouvent de la douleur devant les misères du monde ; heureux ceux qui savent vivre en harmonie avec tout ce qui existe ; heureux ceux qui se battent pour restaurer la justice ; heureux ceux qui éprouvent de la compassion envers tout ce qui vit ; heureux ceux dont la volonté est entièrement dédiée aux autres ; heureux ceux qui travaillent à la réconciliation entre les individus et les peuples ; heureux ceux qui ne trahissent pas leurs convictions devant le danger.

 

Des paroles qu'il nous faut traduire concrètement dans notre vie de tous les jours pour qu'elles ne restent pas des paroles creuses, pour qu'elles ne soient pas du vent et ne s'envolent pas en fumées. La parole de l'Évangile n'a de sens et de réalité que lorsque nous apprenons à la mettre en pratique en toutes choses.

 

C'est déjà ce que nous disait la Loi de Moïse. Lorsqu'elle est donnée au peuple dans le désert, elle est assortie d'une promesse magnifiquement résumée dans le texte du Deutéronome : « que demande l'Éternel ton Dieu ? Sinon que tu lui rendes l'hommage qui lui est dû en tant que créateur de l'univers, que tu l'aimes et observe sa loi afin que tu sois heureux ».  Le bonheur de l'homme passe par cette observance, par cette mise en pratique de la loi.

 

Mais une loi qui, si elle est bien comprise, ne devient pas prison ni barreaux. Les huit béatitudes tout comme les dix commandements que nous apprendrons également par cœur ne sont jamais les barreaux d'une cellule dans laquelle il faudrait enfermer vos rêves, vos espérances, vos désirs et vos énergies. La Parole de Dieu n'est pas une tombe mais une parole de vie ; la Loi n'est pas un bourreau mais un guide, elle est un chemin, c'est le sens originel du mot « torah » : c'est la voie qui nous conduit, qui nous oriente, qui trace un passage dans les ornières et les broussailles de l'existence.

 

Jésus l'a magnifiquement résumé dans le passage que nous avons entendu : « Aimez-vous les uns les autres ; comme je vous ai aimés, c'est ainsi que l'on vous reconnaîtra comme mes disciples » (Jn 13,34) Il ne s'agit pas d'aimer n'importe comment, comme on aime une discipline sportive, ou un jeu ou une personne mais d'aimer « comme je vous ai aimés », autrement dit en étant prêt à tout donner pour le bien de l'autre, exactement comme Jésus a été prêt à donner, même sa vie, pour nous.

 

Un chemin pour chacun d'entre nous

 

Mais cet amour radical, cet amour plus haut et plus fort que tout, c'est la direction. C'est l'objectif, c'est la ligne d'arrivée, c'est la récompense, c'est la fin, c'est ce que nous devons avoir en tête, en espérance lorsque nous nous levons chaque matin. Et pour y parvenir, la Loi, les Béatitudes, la prière sont autant de lumières sur notre chemin, c'est comme si nous avancions dans la nuit, dans une sombre forêt et que ces paroles étaient pour nous comme une lampe dans la nuit.

 

Et l'apôtre Paul, nous en donne à son tour une définition dans sa lettre à l'Église de Philippes « Réjouissez-vous toujours dans le Seigneur ». Cette joie n'est pas facile, elle n'est pas évidente. Paul parle à des gens qui éprouvent de lourdes difficultés. Ils sont rejetés par leur communauté d'origine, ils ne savent pas trop si ce qu'il font est bien, ils doivent tout inventer des pratiques et du mode de vie quotidienne.  Et Paul qui leur a décrit la vie et l’œuvre de Jésus-Christ en la qualifiant de « dépouillement absolu » (Ph. 2) leur trace à son tour un chemin qui commence par la joie et finit par la paix.

 

À ces premiers chrétiens qui ne savent pas encore comment vivre dans la fidélité à Jésus-Christ, Paul donne des pistes, des lignes de vie qui commencent par la joie et par la douceur : une douceur qui doit « être connue de tous », c'est-à-dire non seulement au sein de la communauté mais aussi de tous ceux qu'ils rencontrent. Vous aurez reconnu sa manière de dire « heureux les doux » et il continue « que tout ce qui est vrai, ce qui est honorable, juste, pur, aimable, mérite l'approbation, est vertueux et digne de reconnaissance soit l'objet de vos pensées » (Ph. 4, 8)

 

Là aussi huit qualités qui vont avec les béatitudes, les complètent, les accompagnent et les nourrissent. Autant de qualités qui nous sont aujourd'hui encore absolument vitales. Ainsi de la vérité. N'est-elle pas aujourd'hui en danger ? Quand les faits ne sont plus sûrs et que la vérité devient incertaine, quand les mensonges sont chaque jour plus énormes ? Quand on ne peut plus croire ceux qui nous entourent, que la confiance n'est plus possible, nous sommes en insécurité permanente. Défendre et rechercher la vérité est une tâche essentielle aujourd'hui comme du temps de Paul.

 

Rechercher le bien, le bon, le beau et le vrai

 

Les huit qualités de Paul ont un point commun : ce sont des forces constructives. Elles sont là pour bâtir des solidarités et non pour dresser les uns contre les autres. Plutôt que de rechercher le sordide ou le minable, rechercher ce qui est « honorable ». Et là aussi s'ouvre le champ des questions : qu'est ce qui est honorable ? Les honneurs du monde et de la réussite acquise au prix de la violence et de l'exploitation ou les efforts lents et discrets de ceux qui se battent pour la liberté, la justice et la bonté ?

 

Au cœur de l'exhortation de Paul, cette notion de « paix de Dieu » qui doit garder les cœurs et les pensées en Christ-Jésus. Dans le tumulte et la nuit du monde, nous l'avons entendu tout à l'heure dans la confession de foi de Martin Luther King, même dans les heures les plus sombres du racisme aux États-Unis, il ne cessait de faire un rêve : celui de voir un jour ses propres enfants être jugés non sur la couleur de leur peau mais sur leurs qualités personnelles et individuelles. I have a dream, mais ce rêve n'était pas une illusion : il était entièrement fondé sur la confiance dans la justice de son combat pour la dignité de tous les hommes.

 

Si nous cherchons ce qui est juste, le jugement de Dieu et de notre conscience est mille fois plus important que le jugement des injustes.  Martin Luther King, comme l'apôtre Paul, comme Jésus, savait très bien ce qu'il risquait en se dressant contre l'injustice : la prison, la peur, l'inquiétude perpétuelle et finalement la mort. Et malgré toutes les raisons qu'il aurait eu de renoncer, toutes les anxiétés et les craintes, son cœur et ses pensées étaient en paix. Dans cette paix nourrie par la prière et la méditation constante de la loi de Dieu contenue dans l'Évangile de Jésus-Christ.

 

Nous qui voulons être heureux, recherchons donc ces qualités. Attachons-nous à ce qui est vertueux, à ce qui fait du bien autour de nous. Attachons-nous à la vérité, celle de la raison et de la foi plutôt qu'aux vérités alternatives du monde. Attachons-nous à la pureté, c'est-à-dire à la sincérité de nos actions, à l'authenticité de nos actes et de nos dires. Attachons-nous à qui est aimable, autrement dit à ce qui cultive l'amour plutôt que le rejet. Attachons-nous à ce qui mérite l'approbation : le courage d'être fidèle à ses convictions nourries par l'Évangile. Attachons-nous à la justice qui nous fait considérer tout autre vivant comme un autre nous-même. Attachons-nous à ce qui crée de la reconnaissance et de la gratitude. Et enfin, attachons-nous à ce qui est vertueux, c'est à dire au courage de la bonté. C'est ainsi que la paix de Dieu gardera nos cœurs et nos pensées en Christ-Jésus.



Roland Kauffmann

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